Tribune AlerteBANQUE : FIN D’UN MONOPOLE, FIN D’UN MODELE …?

Michel ROUX, Doyen honoraire Université Paris 13 Sorbonne Paris Cité, l’Administrateur de l’AFGE revient sur sa publication dans le journal Le Monde daté du 22 février 1979.

« Il faut conduire un menteur jusqu’à la porte », proverbe arabe. En cette période de crises, la question centrale pour la banque demeure celle de son utilité pour la collectivité, c’est-à-dire la nécessité de retrouver le sens du réel. Si la profession a poursuivi avec intensité les évolutions engagées depuis de nombreuses années. Aujourd’hui, dans un contexte international d’innovations, tous secteurs d’activités confondus, les crises successives et leurs conséquences amplifient le processus de changement : modifications des repères, des comportements, des paradigmes économiques face à une concurrence exacerbée et à une crise de confiance et d’image. Avec les réseaux sociaux, le numérique, le rythme des mutations s’accélère encore et pourrait remettre en cause bons nombres de stratégies, d’outils et de métiers. Ne serions nous pas déjà, au-delà, de la prophétie plus que trentenaire de « La banque pourrait être la sidérurgie de demain » (a). La problématique est, probablement, autre, sans, toutefois dissiper les nombreuses menaces qui pèsent sur la profession bancaire. Même si les banques sont parfois qualifiées « d’industrie » pour les traitements de masse (instruments de paiement, monétique, conservation des titres…), même, si le marketing, le contrôle de gestion sont intervenus plus tardivement que dans le secteur secondaire, elles ne sont pas des entreprises comme les autres en raison de la nature des prestations, des services et des produits proposés relevant du conseil et de l’argent. Elles assurent un véritable service public car en contrepartie des crédits qu’elles apportent à l’économie, elles créent de la monnaie, cet instrument du lien social dans une économie marchande. Il est donc difficile de comparer la banque avec l’industrie et la sidérurgie. La nature de l’activité bancaire comme ses inquiétudes sont différentes. Sans prétendre à l’exhaustivité, sur la base du monde bancaire tel qu’il fonctionne actuellement, nous nous proposons de repérer les menaces et les paradoxes affectant la profession bancaire et ce, préalablement, à l’examen du possible en matière de pérennisation grâce à une nouvelle gouvernance !

 

De l’histoire et du contexte. A partir de la fin des années 80, les banques françaises, comme toutes leurs concurrentes, se sont lancées dans une politique : – de diversification des métiers pratiqués et de l’offre de produits proposée à une clientèle de plus en plus segmentée ; – de développement   sans précédent des activités de marché dans une internationalisation de plus en plus poussée. Jusqu’au milieu des années 2000, la banque semblait sans cesse repousser les limites de ses activités. Puis vinrent les crises : une crise bancaire américaine immobilière (2007), au départ, qui se mue en crise financière puis en crise de la dette souveraine à partir de 2011, en attendant la prochaine crise des « subbprimes » annoncée aux USA dans le crédit automobile. Cet environnement mouvant et incertain mérite d’être observé à travers les conséquences des incertitudes précitées et des stratégies d’acteurs à déployer en réponses aux évolutions des nouvelles contraintes réglementaires et attentes des clientèles. Mais, déjà, d’autres mutations profondes se profilent : Bâle III, concurrence asiatique, séparation des activités de banque de détail et de marché et ce, dans un contexte de stigmatisation de la profession bancaire. Les débats quant au rôle et au bienfondé des activités de marché des banques n’en finissent plus d’animer la sphère économique et politique. Face à une multitude d’idées préconçues, nous souhaiterions, modestement, contribuer à rééquilibrer le débat. On reproche souvent à la finance d’être déconnectée des réalités économiques, d’avoir perdu le sens de la mesure. Les activités de marché ont-elles encore un rôle d’intermédiation au sein de l’économie réelle ?

Michel Roux,
Le 30 septembre 2014

(a)Titre de l’article de Michel Godet et Jean-Pierre Plas, publié dans le journal Le Monde daté du 22 février 1979.

Pour aller plus loin, consulter la publication de Michel Roux dans la Lettre n°38 de l’AFGE (T3 2014), page 8.

.

Copyright © 2021 AFGE . All Rights Reserved Designed by SEVEN+ { Agence Digitale }